Martial Jesus pour Clubs et Concerts:
Moi qui suis une bille en allemand, j'aurai préféré ne jamais savoir que Scheisseberg signifie "gros tas de merde". Voilà bien le côté potache, mais également humble, de ces ex-Mr Moustache. Garants d'un post hardcore un poil braillé, mais moins chaotique que les canons du genre (At the Drive In sans le parkinson, ou les poitevins Loisirs sans le cognac-schwepps...), les gars ne crachent pas non plus sur l'indie rock type Sonic Youth. Au final, "Cherry Mount" se déguste comme un plat goûtu, costaud - mais digeste, et pour tout dire, aussi éminemment sympathique que ses trop modestes auteurs.

Cactus pour W-fenec:
Scheisseberg : littéralement montagne de merde selon google traduction (copyright)... ouais, d'accord. Pourquoi pas après tout, dans un monde ou la concurrence est rude, il faut savoir annoncer la couleur, se vendre osera-t'on dire. Sauf que Scheisseberg, c'est loin d'être de la merde et à fortiori, une montagne de merde... En effet, le groupe bordelais a des influences pas dégueulasses et le moins que l'on puisse dire, c'est que le résultat est carrément pas dégueulasse non plus sur les 8 titres de Cherry mount. Ça démarre assez fort avec "King of fake" que l'on pourrait appréhender comme un mélange habile de Sonic Youth dans les guitares, d'At The Drive-In dans la dynamique et le tranchant post-hardcore, et Refused pour la voix. Bref, pas les groupes les plus merdiques de la terre. Le riff est saignant, les guitares sont chaudes bouillantes, ça torche pas mal, la voix est un poil monocorde, les réminiscences hardcore sont belles et bien à situer à ce niveau ainsi que dans l'énergie : le résultat est concluant. A partir de ce premier morceau qui annonce la tonalité et les couleurs, difficile de ne pas adhérer au reste qui exploite sensiblement le même filon, tout en l'agrémentant de subtiles variantes. Le groupe semble doté d'un songwriting solide très nuancé, ça tient la route de A à Z, la régularité de l'effort ainsi que sa diversité convainquent et aident grandement à l'adhésion. Mention spécial pour "Under control" qui marque les esprits grâce à un surplus d'énergie, le fameux second souffle d'Hulk Hogan probablement, mais aussi pour "Fangs" qui me reste scotché dans les neurones grâce à un truc ineffable non élucidé durant les nombreuses écoutes. Le doux pouvoir de la musique.
Excellente prod', bonne dynamique, bons morceaux, bonne identité... Rien à dire de plus sur leur cas si ce n'est de continuer dans cette voie. Scheisseberg, c'est définitivement de l'excellente came à se mettre entre les oreilles.

Sofie Von Kelen pour Sons Of Kelen:
Avec environ deux ans d'existence au compteur dont quasiment la moitié consacré à l'élaboration de ce premier album, les bordelais de Scheisseberg ont su, au fil des concerts, peaufiner leur propre formule chimique composée d'un bon tiers de noise, le reste se partageant entre une indéniable obédience screamo ainsi que de lointains accents grungy. Influencés par des groupes typiquement indé 90' tels que Mudhonney, Chokebore ou encore Sonic Youth, ils parviennent cependant à s'extirper de ce parrainage lourd de conséquences et à imposer un son révélant d'énormes différences entre le live et l'album.
Chaotiques voire épileptiques, déversant un son à la fois gras et râpeux porté par les contorsions parfois acrobatiques d'un Robin généralement saucissonné par son câble de micro, les prestations scéniques de Scheisseberg font depuis longtemps partie des meilleurs moments offerts par nos caves locales humides et exigües. A l'inverse, le disque nous dévoile une autre facette du groupe et nous permet enfin de distinguer clairement les excellentes parties de guitare de Choumi et Takuma tandis que la section rythmique gagne en précision ce qu'elle perd en violence gratuite. Plus aigue et beaucoup plus limpide que sur scène, la voix s'éloigne des hurlements dont son propriétaire nous assaisonne dans ses autres groupes (Mac Mannus et Jja) et ce glissement du cri vers le chant, d'ailleurs amené avec beaucoup de naturel, sera probablement la plus grosse surprise de cette première écoute.

Inutile de dire que personne ne saura vraiment ce que ces cinq là ont dans le ventre avant d'avoir écouté cette galette prouvant que Scheisseberg n'est pas simplement l'association de cinq psychotiques profonds agités de spasmes sous une voûte trop basse mais également un mécanisme efficace en studio capable de pondre un opus plus que cohérent.

Vincent Michaud pour Longueur d'ondes:
Un nom à coucher dehors, mais surtout pas fait pour s'y vautrer. Scheißeberg signifie en effet "montagne de merde" en allemand. Un nom qui pue, contrebalancé par un titre d'album aguicheur, le Mont Cerise, mais surtout une musique sonique sans concessions. Les huit titres font mouche, sans vers, dans une veine noise punk mélodique proches de la rencontre entre un Sonic Youth juvénile et Unsane, la terreur en moins tout de même. Les Bordelais tiennent à garder le cap pour chaque morceau, à la limite de perdre haleine. La production est idéale, aucun instrument ne prend le pas, le chant nerveux garde ses distances, le tout se devant de laisser l'auditeur lui aussi sans repos. Une certaine idée de la noirceur s'y propage, teintée d'esprit libertaire forcément. Si sur cet essai discographique on n'est loin du bruit pour le bruit, il se murmure - si l'on peut parler ainsi - que le groupe prend une toute autre ampleur en concert.

Yan Kerforn pour le Cafzic:
Superbe emballage sobre mais aux couleurs qui retiennent l'attention, la première approche est donc positive. En posant le disque sur la platine rapidement j'entends une version noïse et shoegaze, un truc entre les Ride et tous leurs collègues de pallier du début des années 90 avec aussi par moment une amplitude sonore et une puissance héroïque à la manière des Thugs, un bon moyen de m'amadouer hein ? ? ? Ce groupe est bordelais et replace la noïse dans un mouvement capable, au delà de l'impact sonore, de réaliser aussi de véritables mélodies avec dedans de l'humain capable de faire autre chose que de se regarder le nombril, Scheisseberg est musicalement un tout équilibré même si dans le fond c’est animalier, du genre bêtes à cornes aux regards agressifs et à l’envie carnassière. Notons enfin que le chant assez expressif possède un ton proche de ce que produisait Bananas At The Audience, tout en énergie. J'aime bien ce disque et voici ma sélection " King of fake ", " My dumb friends ", " You know who you are " et " Sweet time " (le meilleur d'entre tous !).

Turtle pour Metalorgie:
Comme une évocation de la contre-culture. Ou du "contre-rock" serais-je même tenté de dire. Une résistance. De ces groupes qui ne feront jamais des Bercy ou des Parc des princes. Qui emmerdent Bercy et le Parc des princes. De ces groupes chevillés aux planches des rads et des squats. Avec le jeu brouillon qui va avec. L’ampli fondu. La bière du salut déjà prête sur le bar pour l’après set. La sueur et la crasse.
Tout ça. Tout ça.
On nous casse les couilles à nous dire que le rock est mort quelque part entre les 60’s et les 70’s. Les réac’ portent son deuil. Et ils n’écoutent plus rien. Ils n’écouteront donc pas Scheißeberg – le nom n’aide pas, faut dire –. Ainsi passeront-ils à côté de "King of fake", premier titre de la galette. Ils peuvent maugréer. S’ils changeaient un peu de disque, ils se seraient fait offrir une refonte gratuite de leur dentition avec cette track. Car autant le dire franco, le punch est de taille. Aux croisées des chemins de Welcome To Miami, The Negro conspiracy et At The Drive In, "King of Fake" terrifie la partoche, vomit des kilowatts de basse, varie les jam-parts et termine sur un brisage de nuque d’une rare violence. Mange.
Avec le parfum du caniveau en filigrane, la rage du groupe nouveau venu dans l’étui, Scheißeberg s’agite sans respect pour les grammes de finesse. Du rock garage abâtardi d’emo-rock - RAVI plane quelque part par là (l’excellente "Fangs" en atteste) - et gorgé d'effluves de noise. Du sans pitié. Chargé en barrettes, en riffs, en dévalements tout partout. Ca postillonne, ça gueule et ça dégueule, ça joue quelques titres moins bons ("Sweet time"), ça ne va pas chercher dans l’expérimentation, ça balbutie au niveau de l’anglais, de la justesse. On s’en fout, c’est du live retranscrit. Du fer et du sang. Un disque avec son lot de défauts. Mais c’est ça le rock : un truc avec plein d’aspérités.

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